01/03/2010

Mon amie la rose

Je me faisais peur.
Pas de larmes,ou si peu.
On aurait dit que je m'en foutais...
Alors j'avais extrêmement peur du retour de baton.

Je m'étais dit que je serais forte pour mon père, que je ne craquerais pas.
Et puis...
Ma mère était "morte" depuis des années.
Et j'avais "rangé" sa chambre avec son cadavre dans le lit, à quelques centimètres.

Corps non préparé, yeux ouverts, bouche entrouverte, regard perdu... Alors ; pire ???

Je suis arrivée à l'athanée la première, vu que j'avais la charge de la mise en bière.
En fait, mon père m'avait dit qu'il fallait un genre de témoin lorsque le cerceuil était fermé.
Donc en arrivant, j'ai demandé à la dame comment celà se passait.
La logistique du bon petit soldat... Les occupations terrestres qui permettent de tenir le chagrin à l'écart...

Seulement voilà ; à peine a t'elle glissé la clef dans la porte que la boule dans la gorge s'est formée.
Lorsqu'elle m'a dit "Ca va aller ?", le barrage a cédé (et j'ai dit "oui").
Je suis entrée, et elle était là, dans son cercueil, pauvre petite chose toute ratatinée...
Mon dieu qu'elle avait maigri...
Messieurs dames les thanatopracteurs, je vous tire mon chapeau et en profite pour vous remercier.
Ma mère était très bien maquillée, les lèvres rosées...
On dit que les morts ont enfin l'air en paix, qu'ils ont l'air de dormir.
Non.
Enfin ils n'ont peut être pas tous la même allure, hein, je ne suis pas vraiment spécialisée...
Mais ma mère n'avait pas plus l'air en paix qu'autre chose.
Elle avait l'air morte, point.

Je me suis laissée aller,j'ai pleuré.
Aujourd'hui, là, j'avais le droit. Je m'en sentais le droit.
Ensuite, j'ai regardé les fleurs.
Les notres, des bouquets simples ; pas de couronnes, pas de coussins.
Une gerbe de Maboite avec un petit mot.
Une couronne de deux couples de vieux clients, qui viennent depuis 30 ans...
Et pour finir un coussin de "tous les frères et belles soeurs".
Putain... Ils se sont pas foulés hein...
Ils se sont tellement pas foulés qu'aucun n'a fait le déplacement ; aucun n'a daigné prendre un avion pour faire les 800 bornes qui nous séparent.
Mes parents ont toujours été là pour eux.... Ah oui, l'argument de l'argent ; c'est cher tout ça !
Sauf que...entre un kiné, un avocat, un chef d'entreprise... ma famille n'a pas vraiment de soucis d'argent !
Ca fout un peu les boules... comme un arrière goût amer...

A ce sujet, d'ailleurs, j'aimerais toutes et tous, vous remercier de vos témoignages d'affection, de soutien.
J'ai reçu plus de mails, com' et sms de votre part que de ma propre famille...

Puis au moment ou je sortais, je suis tombée nez à nez avec mon oncle, un de ses frères (qui vit ici).
Bon... j'ai fondu en larmes dans ses bras.
Putain que ça fait du bien de pleurer dans les bras d'un homme grand et costaud.
Je ne peux pleurer que dans peu de bras moi vous savez...
On a pleuré ensemble.

Ensuite mon frère est arrivé... Et allez c'est reparti....
Je me suis reprise pour aller voir mon père.
Mon père n'a pas voulu aller voir ma mère. Pas par manque de courage ; ça il en a pour 10 ; mais parce qu'il veut garder d'elle une image vivante.
J'ai pris une respiration et suis sortie de l'athanée...
Sauf qu'en voyant mon père, je me suis (encore) effondrée.

Après, la dame est venue nous demander si nous voulions assister à la fermeture du cercueil.
Mon frère et moi y sommes allés.
Là...pas de larmes ; juste une immense tristesse, me dire "voilà... c'est fini"...
Même si ça fait des années que c'est fini, que je ne la vois plus rire ou sourire...

Ensuite... direction le crématorium.
Cortège funèbre.
Exposition du cercueil dans une espèce de chapelle (?), avec quelques fleurs.
Là (encore une fois) on a craqué.
Mon père a enfin pleuré à gros sanglots dans mes bras en me disant qu'elle était toute sa vie, et que mon frère et moi étions ses bouées de sauvetage...
Pourquoi dans mes bras ? Parce que mon frère était sorti ; c'était trop pour lui...

Une femme est venue dire quelques mots, nous proposant de passer une dernière fois devant le cercueil, déposer une fleur, mettre la main dessus....
Mon oncle s'est levé le premier... Il n'était vraiment pas bien le pauvre... a posé la main sur le cercueil.
Puis ma tante, qui a posé une fleur.
Un ami, qui a lui aussi posé une fleur.
Et enfin moi.
J'ai pris une fleur d'un bouquet que j'avais fait livrer, une rose rose, je l'ai posée délicatement sur le cercueil, suis restée quelques minutes la main posée dessus....
Personne d'autre n'a eu le courage de ce dernier geste.
Puis le rideau est tombé.
Littéralement.
Et nous sommes partis.

"La crémation prend deux heures"
On est bien peu de choses ; une vie entière résumée en deux heures et une petite boite en métal....



11 commentaires:

  1. lectrice fidl²1/3/10 17:38

    *un bisou de réconfort*

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  2. Oui, ça fait du bien de pleurer. Ca fait sortir un peu le chagrin qu'est là dedans et qu'ose pas se montrer. Parce que comme tu dis, t'en as pas beaucoup des bras autour de toi pour pleurer dedans... Alors oui, c'est bein de pleurer. Ca fait sortir tout ce qui fait mal. Après le chagrin devient nostalgie, après encore il s'estompe. Mais il arrive à partir vraiment que si t'as réussi à pleurer, comme pour lui montrer le dehors, comme pour lui montrer le chemin. Oui, c'est bien que tu aies "pu" pleurer...
    Tendresse et un peu de mes bras (même pas costauds du tout) si t'as encore un peu de chagrin à faire sortir...

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  3. suis là ma belle, tu sais où hein...

    J'ai été avec toi toute la journée.

    Plein de bises

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  4. Rien ne sert de retenir les larmes, c'est un bon moyen d'évacuer toute la peine que l'on ressent à l'intérieur...
    Ce sont des instants très difficile car, je pense, que c'est à ce moment que nous prenons vraiment conscience que l'histoire se termine définitivement.

    Heureusement il reste tous les souvenirs, et même certains qui ne sont pas toujours les meilleurs prennent une autre tournure...

    Tu as été très forte Miss.
    Gros bisous...

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  5. @ Tous/Toutes

    Merci de votre présence. Qui, comme je le disais, est beaucoup plus chaleureuse qu'une autre qui pourtant devrait l'être.
    En meme temsp, la présence de ma famille est assez absente...

    Oui JanSheng j'ai été forte... Tellement forte qu'à l'heure qu'il est, j'ai les yeux qui brulent, la tête qui me fait mal, et que je continue à pleurer...

    Mais bon... La vie continue, hein !
    Et comme vraie vérité du jour, je dirais qu'en plus, nous sommes tous, elle et nous, enfin libérés...

    Demain, j'irai répandre ses cendres...

    Bises à tous/toutes

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  6. La vie est un drôle de mélanges. On pleure à chaudes larmes la perte d'un proche, d'une mère mais on est tellement vivant au fond, tellement animé d'un désir de bonheur.

    Oui tu pleures comme une madeleine, vas-y, je sais que ça ne te fait pas peur. Car tu n'as pas le goût du malheur. Je crois en toi.

    Je t'embrasse très fort et pense à toi.

    Bullette :))

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  7. Je passe te faire un petit coucou Reine.
    On est dans le brouillard les jours qui suivent, mais comme tu dis, la vie continue...et elle reprendra le dessus.
    A bientôt Miss, bisous

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  8. @ Bullette ;-)

    Les larmes, autrefois, je les refoulais.
    Dans ma famille, on n'a pas la culture larmes...
    Et puis j'ai appris à pleurer et me suis rendu compte que ça faisait du bien, permettait d'évacuer :-)

    Non ; tu as raison, je n'ai vraiment pas le goût du malheur !!

    :-) BizBulles

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  9. @ JanSheng

    Par chance, j'ai un boulot (et j'ai beaucoup de boulot qui m'attend) ! Un boulot qui me plait, avec des collègues extras.
    Ca permet de rentrer dans la vie.
    Aujourd'hui, je reviens à la vie.

    Je te remercie de passer me voir JanSheng ; j'en suis touchée, ça fait chaud au coeur.

    Bises à toi, bonne journée

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  10. lilinumero1et29/3/10 10:11

    Impossible de laisser des coms car à chaque fois je pleure, j'ai perdu mon père l'année dernière et tout ce que tu racontes je l'ai vécu. Alors je repousse je repousse, mais aujourd'hui je me décide juste pour te dire que je pense bien fort à toi et que je t'embrasse.

    Lili

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  11. @ Lili

    T'es obligée de pas pleurer pour taper toi ?
    Moi... non. (sourire)
    Heureusement, parce que sinon il y a une paire de notes que je n'aurais jamais écrites !

    Pour toi je ne sais pas ; mais pour moi c'était "facile"... Elle était tellement malade que même si c'est une grande tristesse, c'est aussi un immense soulagement.

    Merci d'avoir fait l'effort de poser quelques mots, Lili.

    Bises à toi

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Moi, ce que j'en dis de ta note, c'est que...